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Par Maude Scallen, avocate

Le dessous de la plainte 32 : de quel recours dispose votre travailleur accidenté?

 

Congédiement, suspension, avertissement, pouvez-vous discipliner un travailleur accidenté? Quelles sont les mesures et les sanctions prohibées par la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles? De quel recours dispose votre travailleur? Et plus important encore, quelles sont les réparations possibles? 

 

L’article 32 de la L.A.T.M.P. énonce que :

 

« L’employeur ne peut congédier, suspendre ou déplacer un travailleur, exercer à son endroit des mesures discriminatoires ou de représailles ou lui imposer toute autre sanction parce qu’il a été victime d’une lésion professionnelle ou à cause de l’exercice d’un droit que lui confère la présente loi. »

 

Lorsque de telles mesures sont prises par un employeur à l’encontre d’un salarié, ce dernier peut déposer une plainte dite plainte 32 à la CNESST. À cet égard, il importe de savoir que la jurisprudence interprète de façon large et libérale cette disposition afin d’accorder la plus grande protection possible aux travailleurs accidentés.

 

Pour pouvoir déposer une telle plainte, un travailleur doit remplir les conditions d’ouverture du recours, soit :

  • Être un travailleur au sens de la L.A.T.M.P.;
  • L’existence d’une sanction ou d’une mesure de la part de l’employeur;
  • Avoir subi une lésion professionnelle ou avoir exercé un droit prévu par la Loi;
  • Déposer la plainte à l’intérieur du délai légal;
  • Absence de grief portant sur le même litige.

 

Tel que prévu à l’article 253 de la Loi, un travailleur dispose alors d’un délai de 30 jours à compter de la connaissance de l’acte, de la sanction ou de la mesure dont il se plaint pour déposer une plainte

Cette plainte doit obligatoirement être faite par écrit. Le travailleur doit en transmettre une copie à son employeur. À ce sujet, sachez que la CNESST a mis en ligne un formulaire intitulé « Plainte en vertu de la LATMP art. 32 ou de la LSST art. 227 » qui facilite le dépôt de la plainte par les travailleurs.

Lorsqu’un travailleur est syndiqué, ce dernier doit obligatoirement opter entre le dépôt d’un grief ou d’une plainte 32. Autrement dit, il est impossible pour un travailleur de faire cohabiter ces deux types de plainte.

Afin de faciliter le fardeau de preuve du travailleur, la Loi renferme, à son article 255, une présomption. La jurisprudence nous enseigne qu’il appartient au travailleur de démontrer, selon la balance des probabilités :

 

  • Qu’il a été victime d’un congédiement, de mesures discriminatoires, de représailles ou d’autres sanctions prévues à l’article 32 L.A.T.M.P.;
  • Qu’il a été victime d’une lésion professionnelle ou qu’il a exercé un droit que lui confère la Loi;
  • Que cette mesure a été prise dans les six mois suivant sa lésion professionnelle ou de l’exercice d’un droit conféré par la Loi.

 

Une fois ces conditions démontrées, la présomption est établie. Il est alors présumé que la sanction ou la mesure prise à l’encontre du travailleur a été prise contre lui en raison de sa lésion professionnelle ou de l’exercice d’un droit. Lorsqu’il bénéficie de la présomption, le travailleur n’a pas à faire la preuve du lien de causalité entre la sanction ou la mesure et la lésion professionnelle ou l’exercice d’un droit.

Bien entendu, un employeur peut renverser cette présomption en démontrant que la mesure prise à l’encontre du travailleur l’a été en raison (1) d’une autre cause juste et suffisante est à l’origine de la sanction et (2) que cette cause est sérieuse et non pas un prétexte.

Lors de son analyse, tant le Tribunal que la CNESST n’ont pas compétence pour évaluer la raisonnabilité de la sanction, et ce, contrairement à l’arbitre de grief. Leur analyse est circonscrite à déterminer la légalité de la sanction et non pas sa sévérité.

Plusieurs situations permettent à un travailleur de recourir à l’article 32 L.A.T.M.P., notamment :

  • Le refus de l’employeur de le rémunérer pour les 14 premiers jours de la lésion professionnelle;
  • Sanction ou représailles de l’employeur en raison du dépôt d’une réclamation à la CNESST ou de la contestation d’une décision;
  • Le refus par l’employeur de payer les heures supplémentaires à un travailleur en assignation temporaire;
  • Le refus par l’employeur de payer les journées de vacances lors du retour au travail;
  • Un congédiement, une mise à pied, une suspension.

 

La jurisprudence a considéré les exemples suivants comme constituant une autre cause juste et suffisante :

  • Insubordination;
  • Absentéisme;
  • Violence au travail;
  • Refus injustifié de retourner au travail;
  • Difficultés économiques de l’entreprise.

 

En ce qui a trait à la réparation possible l’article 257 L.A.M.T.P. prévoit que la Commission peut ordonner à un employeur de réintégrer le travailleur dans son emploi avec tous ses droits et privilèges, annuler une sanction ou de cesser d’exercer des mesures discriminatoires ou de représailles à l’endroit du travailleur et de verser à celui-ci l’équivalent du salaire et des avantages dont il a été privé.

Sachez toutefois que l’octroi de dommages-intérêts ne fait pas partie de l’éventail de réparations possibles.

En terminant, en tant qu’employeur et gestionnaire vous devez évaluer attentivement le dossier de vos travailleurs afin de vous prémunir d’un recours éventuel en vertu de l’article 32 L.A.T.M.P.

En terminant

Objectif du mois

Les frais post-conso : soyez vigilant!

 

Saviez-vous que lorsque la lésion professionnelle de votre travailleur est consolidée sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle, les frais médicaux ne peuvent être imputés au dossier d’un employeur? 

En effet, en vertu de l’article 326 de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles, les employeurs peuvent demander une désimputation de ce type de frais.


Ainsi, par une simple demande écrite adressée à la CSST, un employeur peut demander que soient retirés de son dossier les frais reliés aux soins et aux visites médicales post-consolidation.


En pratique, ces frais peuvent facilement s’élever à quelques centaines de dollars.

Il s’agit d’une mesure simple, mais efficace qui contribuera à la réduction de votre facture CSST. À cet égard, vous pouvez mettre en place un système visant à examiner systématiquement les sommes imputées à vos dossiers. De plus, vous pouvez aisément vérifier l’existence de ces frais par l’intermédiaire du lien électronique CSST dans la section « frais ». 

Votre demande à la CSST doit, notamment, contenir les éléments suivants :

  • Le nom du travailleur concerné;
  • Le numéro du dossier;
  • Un document attestant que la lésion professionnelle de votre travailleur est consolidée sans atteinte permanente ni limitation fonctionnelle (ex. rapport final, décision CSST, etc.);
  • les dates des frais médicaux ou soins à désimputer.

 

Quant au délai pour déposer une telle demande, sachez que les employeurs peuvent et doivent présenter une demande de désimputation dans les trois ans de la date où les frais ont été inscrits sur votre « Relevé des prestations accordées et des sommes imputées » ou du « Sommaire des sommes portées à votre dossier ».

Pour toutes questions, n’hésitez pas à communiquer avec votre conseillère, qui se fera un plaisir de vous accompagner dans votre démarche.


Le présent Blogue ne constitue pas un avis juridique et a été rédigé uniquement à des fins d’information. Les lecteurs ne devraient pas agir ou s’abstenir d’agir en fonction uniquement du Bulletin. Il est de la responsabilité du lecteur de consulter un professionnel pour l’obtention de conseils juridiques spécifiques à sa problématique.

 

 

 

 

 

 

 

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